Nous continuons à cheminer vers Pâques, étape par étape et nous arrivons au 5ème dimanche du temps de carême qui précède la grande Semaine Sainte par le dimanche des rameaux. Nous avons donc encore une semaine de préparation spirituelle à Pâques, cet avènement de la mort et de la résurrection du Christ, fondement de notre foi catholique. Nous avons approfondi plusieurs concepts durant ce carême et nous vous proposons pour cette dernière semaine de nous préparer spirituellement à la Semaine Sainte, en nous intéressant à la notion de pardon.
Le pardon est un mot fort qui revêt autant l’aspect de satisfaction et de plénitude lorsqu’il est atteint, que l’aspect de difficulté et de résilience pour l’atteindre. Le terme de pardon est issu du latin « perdonare », signifiant donner complètement, faire grâce, ne pas tenir compte d’une faute. Par définition, le pardon est le résultat de l’acte de pardonner, la rémission d’une faute. C’est tenir une offense, une faute pour nulle ou l’excuser et renoncer soit, au plan perso, à en tirer vengeance, soit au plan institutionnel à poursuivre et à punir les responsables. Il se différencie cependant d e l’amnistie qui est une simple dispense de peine. Le pardon peut s’entendre et s’interpréter de manière différente le contexte : religieux, philosophique, psychologique, social ou politique.
Au sens biblique, pardonner revêt deux volets et contextes :
- Une action divine : le pardon de Dieu, à un ou des hommes. Dieu annule ou écarte un châtiment pour le péché. Il l’exprime soit par médiation d’un élu ordonné, soit par manifestation divine.
- Une action humaine de pardon : des hommes se traitent avec un amour chrétien en se pardonnant leurs fautes. Ils effacent alors les mauvais sentiments à l’égard de ceux qui les ont offensés.
Le pardon est très important dans le christianisme mais est toujours mis au service du bien spirituel de la personne.
Le pardon fait partie de la prière du Notre Père que Jésus a transmise aux hommes : « pardonnez-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ». il fait également partie de la profession de foi catholique, le crédo : « je crois à la rémission des péchés, je reconnais un seul baptême pour le pardon des péchés »
Dieu a lié le pardon des péchés à la foi et au baptême. Pour les catholiques, les orthodoxes et les anglicans, le sacrement de pénitence et de réconciliation permet de se faire pardonner les péchés par Dieu, par l’intermédiaire du prêtre. Toute la société chrétienne, avec notamment l’abolition de la peine de mort, est dans la lignée de cette morale. Pardonner n’est pas faire preuve de faiblesse, c’est au contraire le courage de se libérer en affrontant différentes étapes : arrêter la souffrance, reconnaitre l’existence du préjudice, donner libre cours à sa colère, cesser de se croire responsable, ressentir de l’empathie pour le bourreau, laisser le temps au temps.
Le pardon est quelque chose qui est vécu différemment au gré des circonstances et de ses croyances. Il est un soin pour notre cœur car faire le choix de pardonner, c’est faire le choix de guérir son cœur. Nous avons tous vécu des évènements qui nous ont blessés, que ce soit pendant l’enfance, l’adolescence ou à l’âge adulte et certaines de ces blessures sont même toujours à vif. Le pardon, c’est parvenir à vaincre son ressentiment envers un offenseur, non pas en niant son droit au ressentiment, mais en s’efforçant de considérer celui-ci avec bienveillance, compassion et même amour. « Tends l’autre joue » nous dit la bible. Tendre l’autre joue ne veut pas dire encourager l’agresseur à recommencer, mais ne pas tomber dans le piège de la vengeance et du « œil pour œil, dent pour dent ». C’est ainsi avoir l’intelligence de renvoyer à l’offenseur un miroir qui lui renvoie le reflet de son offense et le met devant ses faiblesses.
Pardonner, c’est faire en sorte que le mal infligé n’ait plus d’impact sur nous. Le pardon permet de se libérer, de nous délivrer et de permettre au passé de passer, de vivre l’instant présent et récupérer sa liberté en brisant les chaines de la rancœur. Mais cela ne veut pas dire oublier ni excuser mais juste se donner la chance d’avancer, de passer à autre chose. Pour pouvoir pardonner il faut déjà reconnaitre et accepter sont statut d’offensé, de victime, et cela n’est déjà pas facile et nécessite de l’intelligence et du courage. Commencer par l’acceptation, ne plus lutter contre et admettre que l’on ne peut plus rien changer à ce qui est arrivé, et donc qu’il est vain de lutter contre les faits accomplis. C’est ainsi que la résilience prend tout son sens, en faisant de ses épreuves une renaissance, une expérience positive. Car ne pas pardonner, c’est entretenir la souffrance causée par l’offense, et continuer à donner du pouvoir sur nous à l’autre, en cultivant le ressentiment à son égard. Mais c’est en fait à nous même que nous faisons du mal. Les émotions ressenties à l’égard de l’offenseur doivent être vécues et pas niées. Il faut les vivre et être capable de les identifier pour les accepter et passer à autre chose. Ne pas se laisser emprisonner par les émotions négatives par des ruminations et des désirs de vengeance est indispensable pour sortir vainqueur tout en faisant en sorte de ne pas les nier non plus , mais s’en servir comme des armes libératrices.
Il est important d’accueillir les blessures et les impacts qui en découlent. Pardonner c’est retrouver sa liberté, redevenir acteur de sa vie en vainqueur.
Alors essayons de nous concentrer plus sur le pardon durant cette semaine. Quand nous pardonnons, nous n’oublions pas l’évènement mais nous le rendons neutre. La cicatrice reste visible mais ne fait plus mal et le pardon me libère de la souffrance. Ce n’est pas non plus cautionner, nous pouvons juger et condamner l’acte ou le méfait et choisir de pardonner pour mon bien être futur. L’action de pardonner est donc un mouvement libérateur, car un cœur guéri est un cœur capable d’aimer pleinement. Le pardon est un cadeau que l’on se fait à soi-même, mais aussi aux autres en augmentant notre estime de soi et qui nous apportera un sentiment de plénitude. Même si la route du pardon nous parait insurmontable, Dieu peut nous aider à l’atteindre et la satisfaction de l’avoir atteint nous apportera une sérénité et une plénitude inégalable.